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Oyana de Eric Plamondon: Euskanada




😻😻😻😻😻 
Québec
Roman - 152 pages
Quidam Editeur - 2019



J'avais vanté ici la beauté et l'originalité du génial Taqawan publié en 2017, déjà dans une édition sublime sortie de chez Quidam Éditeur.


Eric Plamondon récidive cette année, toujours dans une édition sublime sortie de chez Quidam Editeur, avec le très beau Oyana.

Mai 2018, à Montreal, une femme attend ses suhis à emporter en réfléchissant à la manière de ressouder son couple lorsque ses yeux se posent sur les pages d'un journal titrant: "ETA annonce sa dissolution".

A lecture de ces mots, la gentille épouse mexicaine d'un médecin québécois s'efface, et Oyana remonte à la surface d'elle-même.

Car depuis plus de 20 ans, Oyana vit cachée, elle a construit la vie d'une autre qui est pourtant la sienne,  contrainte à l'exil, dépassée par le sens de l'Histoire.

ETA n'est plus, Oyana peut rentrer.

En réalité Oyana DOIT rentrer, sans trop savoir pourquoi, sans trop savoir pour qui, sans trop savoir où.

Son pays basque l'appelle, c'est le chant des sirènes, ou des baleines.

Avant d'abandonner un peuple de baleiniers pour un autre, Oyana veut expliquer à Xavier, son époux, lui raconter, expier peut-être...

Mais comment fait-on pour raconter une vie de douleurs, d'oubli et de mensonge ?

"L'avantage de larguer les amarres, c'est la dérive"

Oyana, c'est un précisément le roman de la dérive, celle d'une femme qui ne sait plus qui elle est, celle d'un combat légitime qui devient terrorisme...

C'est un roman sur la question de l'identité, trop souvent simplifiée, réduite au seul sentiment d'appartenance.

Oyana est construit sur une succession de chapitres brefs: certains constituant l'intrigue principale, la longue lettre d'Oyana à son époux, interrompus par d'autres sans lien direct avec celle-ci, mais ayant trait à l'Histoire dans laquelle elle se situe.

Ces ruptures de récit rappellent évidemment la construction de Taqawan, même si elle sont à mon sens ici moins pertinentes, moins signifiantes peut-être aussi.

Toujours aussi politique, Oyana est en revanche plus poétique, porté par une écriture sèche, parfois abrupte, qui fait mouche à chaque coup qu'elle porte.

152 pages qui passent en un instant, comme un voyage suspendu, vraiment, ce serait dommage de ne pas embarquer.











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