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Florida de Olivier Bourdeaut: les corps maudits

 


😻😻😻

Roman - 256 pages

Finitudes - 2021


Douloureux.

C'est le premier mot qui me vient à l'esprit en refermant ce troisième roman de Olivier Bourdeaut.

Si son En attendant Bojangles nous emportait dans un tourbillon de fol émerveillement, ici c'est la douleur qui nous fait perdre la tête.

L'histoire c'est celle de Elizabeth Vernn.

Pour son septième anniversaire sa mère, plutôt que de lui préparer un gâteau au yaourt, décide de l'inscrire à un concours de mini miss... Pas de chance pour Elizabeth, elle gagne et sa mère perd la boule. 

S'ensuivent 5 années d'une spirale odieuse de maltraitances diverses qu'on souhaiterait pas à un animal. D'ailleurs, comme le dit Elizabeth, au contraire des salles des fêtes pourries des concours de "beauté", il y' a toujours des gens pour protester devant les cirques, de quoi envier les sort des otaries.

Et puis un jour, Elizabeth décide de pisser (littéralement) sur ce bien triste spectacle. C'aurait pu être la fin du désastre, mais la vérité, c'est qu'il est bien rare de toucher le fond sans pouvoir creuser un peu plus.

Elizabeth reprend alors le contrôle de son corps pour se venger de ses parents, mais elle le fait en le transformant à l'extrême, pour l'imposer dans la laideur ou l'effacer, pour le libérer des enjeux qu'on lui a assigné depuis ses 7 ans.

Il y a quelque chose de jouissif dans ces modelages successifs, dans la manière dont Elizabeth se réapproprie son corps pour se jouer de la perception qu'en ont les autres et pour en faire une arme de pure destruction.

Mais la jouissance est brève, parce qu'au final, évidemment, c'est une maltraitance qu'elle substitue à une autre, une automutilation qui hurle la souffrance et le désespoir.

Cette haine de soi m'a laissée un peu sur le bord du chemin, je n'ai pas réussi à m'attacher à cette héroïne, trop pleine d'une rage crue, froide et méthodique.

Trop de douleur, transcrite dans un style trop saccadé, hâché parfois à l'extrême, qui demeure certes efficace, puisqu'il ne laisse aucun répit là ou peut-être quelques pauses auraient à mon sens été salutaires. 

Un peu trop pour moi, en substance. 

C'est un roman cohérent, mais dont la lecture m'a été pénible, presque suffocante, pour des raisons je pense purement subjectives.

Quoiqu'il en soit, c'est un livre qui ne risque pas de laisser de marbre et c'est un nouveau bon point pour Olivier Bourdeaut.












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