😻😻😻😻😻 - Coup de cœur
Roman - 334 pages
JC Lattès - 2020
✩ Sélection mars jury Grand Prix des lectrices ELLE 2020 ✩
Au début, il y a
une première histoire, celle de Corentin, « l’enfant du malheur », balloté de familles d’accueil en hébergements provisoires au gré des humeurs de
sa génitrice, jusqu’au jour où celle-ci l’abandonne dans Les Forêts, chez la vieille
Augustine, sa grand-mère.
Corentin va y
trouver un refuge et de l’affection.
Loin de tout,
mais au cœur de l’essentiel, il apprend la vie, la nature et ses cycles
qui se raccourcissent quand même beaucoup, se détraquent, mais il y a l’amitié,
mais il y a l’amour, un tout qui lui permettra de prendre son envol sereinement
pour « la grande ville ».
Là-bas, Corentin se
perd entre les lumières d’une ville toujours en mouvement, et le souvenir de
ses calmes forêts d’enfance.
Mais il y a les
couleurs, le bruit, toujours le bruit, jusqu’au jour DU bruit.
Un bruit sourd, qui
lui parvient étouffé, lui qui, replié au plus profond des catacombes, s’est
imbibé d’alcool, s’est noyé dans l’euphorie d’une jeunesse impatiente.
Corentin ne le
sait pas encore, mais il est désormais un survivant, et le monde tel qu’on le
connaissait vient de disparaître, purifié par le feu.
« Le
bruit se heurtait au silence des grandes peurs »
Rien, il ne reste
plus rien qu’une nature et des corps carbonisés, des pluies acides et des
nuages de cendres… et la peur.
Chacun cherche un
refuge, et pour Corentin il n’y en a qu’un : les Forêts, et Augustine.
Avec Et
toujours les Forêts, Sandrine Collette nous livre presque deux romans, tant
les premiers paragraphes concentrés sur l’enfance de Corentin, constituent en
eux-mêmes un roman social admirable, notamment par la finesse de la psychologie
des personnages.
La rupture narrative
et le basculement vers le roman post-apocalyptique n’en sont que plus choquants,
tant on s’était attaché en quelques paragraphes à Corentin.
Du moins à celui
d’avant le drame, car on comprendra bien vite qu’on ne peut par rester la même
personne après « ça » …
Plus proche de Cormac
McCarthy que de la fable écolo-romantique de Jean Hegland, Et toujours les
Forêts est le roman de la renaissance : celle de Corentin, celle de l’humanité,
et celle bien sûr, de la Planète.
L’écriture
toujours acérée de Sandrine Collette sert parfaitement le récit, oscillant
entre l’aridité du désespoir et les langueurs de la mélancolie, parfois morcelée
à l’extrême quand Corentin perd pied, incapable d’appréhender cette nouvelle
réalité.
Sandrine Collette
joue avec nos nerfs, serre et desserre sa prise jusqu’à une scène finale absolument
épique qui m'a laissée à bout de souffle.
Du pur génie.
Sombre, c’est
certain le roman l’est, et pire encore, mais il n’est pas l’histoire de la fin,
non, au contraire.
Et toujours les
Forêt, c’est le roman du commencement :
celui de la prise de conscience, le début d’un monde nouveau, où tout est à
découvrir, ou tout doit être oublié, et réappris, mais pas la fin: le commencement.
De loin, le meilleur
roman en lice jusque là (reste avril) pour le Grad prix des lectrices ELLE 2020, et probablement des rentrées littéraires cumulées de
septembre et de janvier.
Foudroyant, et indispensable.
(J'aime les adjectifs).
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